Die Arbeit mit dem Menschen braucht wieder mehr Raum und Ressourcen.
AIDE PERSONNELLE

Aide personnelle – lui rendons-nous justice ?

08.03.2021
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Aujourd'hui, l'aide sociale doit non seulement garantir une existence digne, mais aussi répondre à l'objectif de promouvoir l'intégration sociale et professionnelle des personnes concernées. L'aide personnelle fait office d’élément de liaison dans ce processus. Les bénéficiaires de l’aide sociale profitent d'un encadrement professionnel  afin d’assurer la mise en œuvre du plan d'aide établi et l’atteinte des objectifs individuels qui y sont définis.

La mission, l'objectif et l'approche de base semblent incontestables. Quiconque consulte les lois et ordonnances y trouvera toutes les dispositions requises. La discussion porte plutôt sur les méthodes nécessaires à l’exécution du mandat et le montant ou les ressources humaines associées. Quelles sont les stratégies d'intégration efficaces ? Faut-il absolument des experts du travail social pour assurer un accompagnement réussi ? Le personnel administratif ou même des bénévoles peuvent-ils faire l’affaire ?

Outre le fameux débat sur les ressources, il s'agit aussi d'interpréter le principe de « prestation et contre-prestation ». Quelles obligations les bénéficiaires de l'aide sociale doivent-ils remplir et sous quelle forme ? Quels moyens les amènent à respecter les règles ? Trop souvent, les avis exprimés véhiculent une image négative des bénéficiaires de l'aide sociale. Seule une minorité semble persuadée que les personnes concernées sont intrinsèquement disposées à améliorer leur situation. La dépendance à l'aide sociale suscite immédiatement du scepticisme et des soupçons, laissant entendre qu’il est question d’échec personnel, de manque de discipline ou d'avantages et d’abus. Depuis un certain temps, la réponse politique à ces opinions - parfois délibérément cultivées - consiste à exercer une pression sur les personnes concernées afin qu’elles « rentrent dans le droit chemin ». Les résultats de cette évolution : les bénéficiaires disposent de moins en moins d'argent, tout en étant tenus de répondre à un large éventail d'exigences, de directives et d'obligations de coopérer. Une situation qui va de pair avec la complexité croissante du dépôt d'une demande d'aide sociale et l'affectation de nombreuses ressources à toutes sortes de tâches de contrôle au sein des services sociaux.

L’objectif n’est nullement de remettre en question le fait que la perception de prestations d'aide sociale doive être liée à des conditions et obligations claires, dont le respect fait l’objet d’un contrôle adéquat. Tout système peut donner lieu à des abus et ne pas sembler digne de confiance en l’absence d’outils appropriés. Il reste toutefois à savoir si nous sommes encore en mesure de fournir une aide personnelle dans les circonstances actuelles. Si les travailleurs sociaux sont submergés par le contrôle, les avertissements, les conditions, les instructions, les sanctions, la gestion des dossiers, etc., comment peuvent-ils encore fournir l'assistance professionnelle requise ? Et une autre question se pose : si la majeure partie des tâches est orientée vers le contrôle et

« les exigences », où reste-t-il de la place et de la volonté pour l'encouragement ? Où trouver le temps et la motivation pour interroger l'autre personne sur le chemin idéal qu’elle compte emprunter ?

Plus de place pour l’aide personnelle dans les normes

D'un point de vue professionnel, la relation défavorable entre un niveau de contrôle élevé et le manque de ressources pour entamer un dialogue constructif avec les personnes concernées n'est pas nouvelle. Entre-temps, des études ont montré qu'une aide personnelle adéquate, c'est-à-dire un conseil, une prise en charge et un accompagnement personnalisés, est un important facteur de réussite pour une intégration durable. Par conséquent, la révision des normes CSIAS a également permis de présenter l'aide personnelle comme étant égale et indépendante de l'aide matérielle. À l'avenir, les normes lui accorderont encore davantage de place, avec plus d'explications et d'aides pratiques. Le message est clair : il est uniquement possible de poser des exigences à l’égard des bénéficiaires d'une aide personnelle. Toutefois, seule la création d’un terrain fertile permettra de saisir toute l'ampleur et la justesse du message. Pour ce faire, la société et la politique doivent poser un nouveau regard sur l'aide sociale à deux égards :

Tout d'abord, il est indispensable de toujours identifier les vraies raisons d'une dépendance à l'aide sociale. Beaucoup associent la pauvreté à la faiblesse économique, c'est-à-dire au manque d'argent. Les recherches ont depuis longtemps montré que le cause de la pauvreté ne réside pas dans le manque de moyens financiers pour assurer l'existence, mais qu’elle résulte en général d'une pénurie dans d'autres domaines importants de la vie. Les problèmes de santé, les traumatismes, le faible niveau de formation, le manque de compétences clés, le fait d'avoir des enfants et de s'en occuper, l'isolement ou une pénurie de logements sont les véritables raisons de la pauvreté. Il est évident que la pression et les fortes exigences à l'égard des bénéficiaires de l'aide sociale ne permettent pas, dans un tel contexte, d’obtenir de véritables résultats, car ces derniers ne peuvent pas remédier à leur situation par eux-mêmes. Ils ont besoin d'une aide professionnelle pour trouver une issue de secours.

L’aide sociale en tant que système de développement

Deuxièmement, l'aide sociale doit à la fois être reconnue comme un système de garantie de l’existence, mais aussi comme un système de développement similaire à celui d'une institution de formation. Dans le même esprit que les raisons exposées ci-dessus, les personnes concernées doivent avoir la possibilité et disposer des instruments pour développer leurs ressources. Elles doivent pouvoir acquérir les compétences et combler les lacunes afin de pouvoir mener une vie autonome. La garantie d'une existence conforme à la dignité humaine est à ce titre la condition de base. Seules les personnes bénéficiant d'un accompagnement fiable et suffisant peuvent entamer un parcours de développement. A noter qu'une pénurie financière permanente ne permettant pas de couvrir les besoins de base est plutôt contre-productive, ou tend à fragiliser et à démotiver les personnes concernées.

Mettre l’accent sur les possibilités plutôt que les déficits

Si l'aide sociale doit fonctionner comme un système de développement, il faut adopter une approche quelque peu différente : l'accent doit être mis sur les possibilités de la personne concernée et non pas sur ses déficits. Vu sous cet angle, il convient non seulement d'examiner sa situation de vie actuelle, mais aussi de procéder à une analyse interdisciplinaire complète de son potentiel. Celle-ci constitue la base de la « planification des investissements » et renseigne sur les facteurs de succès. Elle indique, par exemple, s'il convient de rattraper une formation ou d’opter pour une qualification à bas seuil, voire de privilégier la situation du logement. L'instrument des prestations circonstancielles offre en soi la marge de manœuvre juridique nécessaire. Toutefois, les efforts visant à transformer l'aide sociale en système de développement vont de pair avec le fait d'accepter qu'un certain groupe de bénéficiaires ne sortira plus jamais de l'aide sociale. Indépendamment des attentes habituelles en matière de performance, il faut leur offrir des perspectives alternatives, qui soient reconnues et considérées comme un investissement judicieux.

Si le regard porté sur l'aide sociale change, il sera aisément accepté d’accorder davantage de place et de ressources au travail avec les personnes concernées. Ce n'est qu'ainsi que l'aide personnelle peut remplir sa mission et créer des conditions motivantes afin que les demandeurs deviennent responsables de leur projet d'intégration. Dans le meilleur des cas, elle intervient avant même le recours à l’aide matérielle. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la pandémie du coronavirus pourrait être l'occasion de communiquer les liens susmentionnés. Elle met fortement en exergue la fragilité de la protection contre la pauvreté, le rôle des conditions structurelles et le fait que la pauvreté s’apparente à une pénurie multidimensionnelle. Saisissons cette opportunité et baissons sans plus attendre le son du haut-parleur qui préconise en permanence une pression accrue et encore plus de contrôle.

Claudia Hänzi
Directrice du service social de la ville de Berne, Présidente de la commission normes et pratique