
L'intégration professionnelle à la force du poignet ne fonctionnera pas
L'intégration professionnelle et sociale constitue, avec la garantie du minimum vital, l’un des principaux enjeux de l'aide sociale. Ces dernières années, le nombre de bénéficiaires sans emploi a fortement diminué. Les fournisseurs de programmes d'insertion professionnelle ressentent aujourd’hui, que les participantes et participants actuels font face à des difficultés différentes, souvent plus complexes. La question centrale est désormais de savoir comment les personnes à capacité de travail réduite peuvent accéder au marché du travail primaire.
Dans le débat politique, l’intégration sur le marché de l’emploi est aujourd’hui principalement discutée à propos des réfugiés. Fin 2023, le Conseil fédéral s’est fixé pour objectif que 40 % des personnes au bénéfice du statut S aient un emploi d’ici fin 2024. Les ORP et l’aide sociale doivent collaborer plus étroitement afin d’accélérer ce processus. À l’été 2024, un groupe d’experts a proposé des mesures d’économie, dont la réduction des forfaits globaux versés par la Confédération aux cantons pour couvrir les besoins vitaux des réfugiés. L’économie attendue avoisinerait 700 millions de francs dès 2028. Cette mesure vise, selon le rapport, à « renforcer l’incitation des cantons à favoriser une intégration rapide sur le marché du travail ».
Depuis, de nouveaux concepts ont été adoptés aux niveaux national et cantonal, des programmes lancés et davantage de cours de langue proposés. Néanmoins, l’objectif des 40 % n’a pas été atteint, ce qui n’a surpris ni les spécialistes de l’intégration ni ceux de l’aide sociale. Beaucoup d’idées relancées ou discutées ne sont pas nouvelles.
Des projets pilotes connus, comme « Pforte Aargau » au début des années 2010, « Pôle Insertion + » à Fribourg ou encore l’Agenda Intégration lancé il y a cinq ans, ont déjà fourni de nombreuses expériences et enseignements. Les défis en matière d’intégration professionnelle et de collaboration entre systèmes sont identifiés depuis longtemps, mais restent à résoudre. Des opportunités existent toutefois lorsque des partenaires engagés s’accordent sur des objectifs communs et lèvent ensemble les obstacles.
Les objectifs ambitieux fixés par la Confédération peuvent redynamiser une collaboration interinstitutionnelle parfois assoupie, et donner un nouvel élan à l’Agenda Intégration. Les évaluations montrent une hausse du taux d’activité des réfugiés. Mais une chose est sûre : si l’intégration professionnelle est imposée à coups de mesures coercitives, elle est vouée à l’échec. Il faut du temps pour s’adapter à une nouvelle culture, apprendre la langue et trouver sa place sur le marché du travail. Pour la plupart, ce processus prend plus de quatre ans. De même, retrouver un emploi après une perte liée à des problèmes de santé demande patience et persévérance. Pour avancer sur cette voie, un engagement conjoint et un financement partagé entre la Confédération et les cantons sont indispensables.