Les PC Familles font désormais partie intégrante de la politique familiale vaudoise,
Focus

Les PC Familles vaudoises : un coup de pouce aux familles à faibles revenus

05.06.2022
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Introduites dans le canton de Vaud depuis plus de dix ans pour aider les familles qui travaillent mais n’arrivent pas à couvrir leurs besoins essentiels, les prestations complémentaires pour familles (PC Familles) représentent une aide financière qui est parfois nécessaire afin d’éviter la précarisation et le recours à l’aide sociale. La deuxième évaluation de ce dispositif, réalisée par les bureaux d’études Microgis et Evaluanda, met en lumière son efficacité et son effet positif sur le quotidien des ménages concernés.

Depuis 2011, les PC Familles offrent un complément de revenu aux familles avec enfant(s) jusqu’à 16 ans, vivant dans le canton depuis au moins trois ans et disposant de revenus modestes. En moyenne, l’aide est octroyée pendant une durée de deux ans. Elle est versée sous la forme d’une allocation mensuelle, qui varie en fonction de la composition du ménage et de l’âge des enfants, et de remboursements de frais de maladie et de frais de garde. En 2020, le montant moyen de la prestation mensuelle perçue par famille était de près de 1030 francs. Le nombre de ménages au bénéfice des PC Familles était de 5536 à fin décembre 2020.

Le canton de Vaud est, avec le Tessin, Soleure et Genève, l’un des quatre cantons en Suisse à disposer d’un régime de prestations complémentaires pour familles. Le dispositif vaudois découle du programme de législature 2007-2012 du Conseil d’État et de sa stratégie de lutte contre la pauvreté, portant notamment sur des mesures visant à renforcer les dispositifs sociaux en amont de l’aide sociale.

Conceptuellement, les PC Familles s’appuient sur le principe que l’aide sociale n’est pas adaptée aux familles à faibles revenus qui travaillent et qui doivent faire face à des problématiques principalement structurelles et temporaires, liées à la présence d’enfant(s). Ces ménages se trouvent dans des phases de vie où ils ne peuvent pas toujours déployer leur plein potentiel d’activité et nécessitent un soutien temporaire. Afin d’éviter tout effet désincitatif quant au maintien ou à l’augmentation d’une l’activité lucrative, le modèle vaudois intègre trois mesures spécifiques : un montant minimum de revenu (revenu hypothétique) est imputé dans tous les cas lors du calcul des revenus déterminants de la famille ; une franchise (en tout point incitative) est appliquée sur le revenu d’activité lucrative ; les frais de garde liés à une activité lucrative peuvent être remboursés.

Le financement des prestations est assuré par les cotisations paritaires des employeurs, des employés et des indépendants et par la contribution du canton et des communes. Les collectivités publiques et les partenaires sociaux sont réunis au sein d’une commission d’évaluation, chargée par la loi d’évaluer régulièrement le dispositif.

Ainsi, un premier mandat d’évaluation a été attribué en 2015 au Bureau d’études de politique du travail et de politique sociale (Bureau BASS). En 2021, les bureaux d’études Microgis et Evaluanda ont été mandatés afin de réaliser un deuxième rapport d’évaluation portant sur les années 2015 à 2019. Le Département de la santé et de l’action sociale vient d’en publier les résultats.

L’étude confirme le bien-fondé et l’utilité du dispositif PC Familles, dont plus de 11 000 familles ont pu bénéficier entre 2011 et 2019. Sans ce dispositif, ce sont autant de familles qui se retrouveraient en situation de précarité.

Les résultats principaux

L’appropriation progressive du dispositif par les familles vaudoises qui en nécessitent semble toucher à sa fin. La croissance annuelle de près de 20 % au début du régime est passée à 11 % en 2016, puis à 4 % en 2019 (2 % en 2020). En 2019, le taux de ménages bénéficiaires au sein de la population de référence vaudoise atteint 7,1 % et la distribution touche l’ensemble des régions du canton, si l’on neutralise les disparités démographiques et socio-économiques régionales.

Les principaux traits des ménages au bénéfice des PC Familles évoluent très peu. Les typologies suivantes restent surreprésentées : familles monoparentales (taux de recours de 18,2 % par rapport à la population de référence) ; familles nombreuses (taux de 9,2 % pour les familles avec 3 enfants) ; les ménages extra-européens (taux de 16,3 %) et enfin les familles avec parents sans formation professionnelle (taux de 13,2 %).

Les parcours des bénéficiaires du dispositif présentent une grande diversité de trajectoires : seuls 10 % désormais proviennent désormais de l’aide sociale. À fin 2019, il apparaît que 47 % des ménages qui ont bénéficié du dispositif en sont sortis. 36 % de ceux-ci ont retrouvé une autonomie financière complète ; 11 % en revanche doivent faire appel à l’aide sociale.

Une hausse de l’activité lucrative des ménages au sein du dispositif a pu être observée ces dernières années. Aujourd’hui, le taux d’activité s’élève à environ 80 % pour les ménages biparentaux et à environ 55 % pour les ménages monoparentaux. Ainsi, on peut constater que le régime ne freine pas l’évolution du revenu des familles concernées ni leur autonomie financière.

Les entretiens qualitatifs ont pu montrer que les familles peuvent bénéficier d’une forme de stabilité dans l’organisation de leur vie familiale, grâce à une certaine indépendance financière permettant ainsi d’améliorer leurs chances de succès sur le plan professionnel à moyen et long terme. Selon l’étude, les familles reconnaissent le bien-fondé et l’utilité du dispositif. Des bénéficiaires affirment également que leur stress vis-à-vis des finances est ainsi diminué, ce qui a un impact positif sur leur santé.

Le dispositif soutient l’autonomie financière des familles, et cela autant du point de vue qualitatif que quantitatif (renforcement progressif des taux d’occupation et des revenus des familles, comme du taux de sorties « définitives » du dispositif). Toutefois, la conciliation entre la vie privée et l’activité professionnelle des ménages bénéficiaires est parfois rendue difficile en raison de la difficulté d’accès aux prestations de garde institutionnelle, en particulier pour les familles avec des horaires de travail atypiques. Ceci peut peser sur l’autonomisation des familles. De plus, malgré leur forte présence sur le marché du travail, les bénéficiaires de PC Familles restent vulnérables certainement aussi en raison de leur niveau de formation.

Le Coaching PC Familles, qui est offert sous une forme-pilote à ce stade, semble être néanmoins un moyen très concret et efficace pour répondre aux besoins de certaines familles et les accompagner vers une autonomie lors de la sortie du régime.

À part l’analyse du dispositif, le rapport contient aussi un certain nombre de recommandations, dont précisément le renforcement du programme Coaching PC Familles. Ce programme-pilote s’adresse aux familles qui doivent faire face à une diminution de la prestation lorsque leur dernier enfant atteint l’âge de 6 ans. Il vise à combler la perte de revenu et à gagner en autonomie. Ces familles ont eu l’opportunité d’être suivies par des coaches afin d’améliorer leur situation professionnelle, en revisitant parfois leur organisation familiale, en changeant d’emploi ou en augmentant leur taux d’activité. 83 % des participants ont réussi à augmenter leurs revenus. Vu le bilan très positif, ce programme devra également s’ouvrir à l’avenir à d’autres familles qui sont confrontées à des difficultés face à leur situation d’emploi ou d’organisation familiale.

Il est également recommandé de diversifier les modalités d’information aux familles et de mettre parfois à disposition des appuis administratifs ponctuels et légers. Ces aspects seront donc étudiés afin de renforcer l’accessibilité de ce régime.

Faisant désormais partie intégrante de la politique familiale vaudoise, les PC Familles ont montré leur efficacité pour répondre aux besoins des actifs et actives à faible revenu ayant charge de famille. Diminuer la pauvreté des familles qui travaillent, prévenir leur recours à l’aide sociale, favoriser le maintien de leur activité lucrative ou son augmentation : l’atteinte des objectifs du dispositif vaudois est à nouveau confirmée par cette récente évaluation.

Informations supplémentaires: www.vd.ch/PCFamilles

Anouk Friedmann
Directrice Direction des aides et des assurances sociales Canton de Vaud